Il s’agit, me semble-t-il, vraiment de l’idée de responsabilité dans un nombre de débats éthiques et politiques très actuels. L’idée serait qu’avec la modernité s’instaure l’accès à l’autonomie individuelle (l’intériorité) et avec ce changement aurait opéré au début du XXieme siècle une aspiration à un contrôle et une maîtrise de soi (et de ses pulsions). Donc dans un premier temps cet accès à l’autonomie – la possibilité du sujet de se penser autonome – serait allé de pair avec une (hyper-)culpabilisation (Freud, la religion). Peut-être dans un espèce de contre-coup du balancier on aurait alors évolué au XXième siècle, jusqu’à maintenant, à une déresponsabilisation (mais en maintenant l’idée de l’individu), sur le double versant du “ce n’est pas moi, c’est mon corps” et “ce n’est pas moi, c’est la société” (je suis victime de mes gènes, mes organes, mon temps, la société etc.).
Je pense, pour ma part, qu’il y a responsabilité singulière, quel que soit le corps et quelle que soit la société – et qu’on doit pouvoir être amené à répondre, même pour ce qu’on ne contrôle pas linéairement ou exhaustivement. Et je pense qu’une responsabilisation singulière est possible sans que ça ne mène structurellement à une hyperculpabilisation (ou à de l’obsessionalité comme le propose Pierre-Henri Castel ci-dessous). Mais je pense aussi que pour qu’il y ait possibilité d’assumer son implication subjective, on doit avoir accès aux outils qui permettent de la penser – ce qui n’est pas (encore) le cas, me semble-t-il.
voir: Pierre-Henri Castel à propos de “La fin des coupables” et du “Cas Paramord”